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Litcheutcheu

mardi 5 mai 2009

Grippe petit b

L’épidémie de grippe porcine a eu pour premier effet de mécontenter les éleveurs de porcs du monde entier, souffrant de voir ainsi dénigré leur bétail chéri au mépris du respect que l’on doit à tout être vivant sur la Terre, même si le destin de ce dernier le condamne à finir en tranche de saucisson dans l’assiette d’un amateur éclairé de charcuterie fine. Après avoir subi l’opprobre, les éleveurs de porcs parvinrent non pas à rétablir mais à sauver le reste de réputation encore attachée aux cochons en obtenant que le nouveau fléau fût débaptisé. De porcine la grippe ne porta plus l’épithète mais devint mexicaine. On optait sagement pour une mention géographique que l’on espérait neutre ; les éleveurs soufflaient et l’on croyait ainsi éloigner la tempête du ressentiment. C’était sans compter sur la susceptibilité mexicaine. Comment oser porter ombrage au pays du sombréro ? Et l’on se mit à hurler à la discrimination. Et la grippe perdit de nouveau son qualificatif pour ne garder qu’une lettre, le A. Tous semblaient s’en satisfaire ; Mexicains et Porcins avaient retrouvé leur dignité ; personne ne semblait se soucier de ce que pouvait bien penser de tout ceci la jolie lettre A qui ouvre de façon si magistrale notre alphabet. Il fallait qu’une voix, isolée, s’élève enfin pour prendre la défense de cette malheureuse lettre qui n’a rien fait de mal. Pourquoi diable la coller à la grippe ? Au nom de tous les A, je demande solennellement à ce que la grippe qui frappe aujourd’hui l’humanité ne soit pourvue d’aucun attribut, pas même une épithète, pas même une lettre… si ce n’est peut-être, un petit b.

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